Les objectifs d'Elior séduisent mais laissent certains analystes dubitatifs - DJ Plus
November 24 2021 - 9:50AM
Bourse Web Dow Jones (French)
Julien Marion,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Le menu d'Elior éveille l'appétit du
marché. Le groupe de restauration collective a publié mercredi ses
résultats annuels et communiqué des objectifs à la fois pour
l'exercice en cours, clos en septembre 2022, et pour le moyen
terme.
Qualifiées à l'unisson "d'ambitieuses" par les analystes, les
cibles à moyen-terme concentrent l'attention de la communauté
financière. Après une hausse d'au moins 18% en 2021-2022, Elior
entend enregistrer une croissance organique supérieure ou égale à
7% sur les deux exercices suivants. Le groupe compte également
atteindre une marge d'Ebita ajusté - le résultat opérationnel
courant retraité de certains éléments - d'environ 4,6% en
2023-2024, soit 100 points de base de plus qu'en 2018-2019, le
dernier exercice à avoir été épargné par la crise sanitaire. Citi
souligne que le consensus anticipait jusqu'à présent une marge bien
plus faible à cet horizon, de 3,9%, tandis que UBS apprécie ces
objectifs, évoquant "une bonne surprise".
Les investisseurs ont salué ces annonces, le titre Elior ayant
bondi de plus de 8% à l'ouverture, avant de tempérer leur
enthousiasme. En milieu d'après-midi, l'action ne gagnait plus que
1,3%, résistant toutefois à la baisse générale du marché.
Les PME comme nouvelles opportunités
"Les préoccupations actuelles concernant la résurgence des cas de
Covid-19 en Europe risquent de détourner l'attention de la mise à
jour" des perspectives à moyen terme du groupe "d'autant plus que
les objectifs semblent difficiles à atteindre", explique Société
Générale. "Le marché aura besoin de preuves, notamment au niveau de
la trajectoire de la croissance organique, pour valider réellement
les ambitions du groupe à moyen terme", abonde Florent Thy-Tine,
analyste au sein de Midcap Partners.
Elior devra surmonter plusieurs défis, en résistant notamment au
développement structurel du télétravail. Philippe Guillemot, le
directeur général du groupe, a évalué l'impact de ce phénomène à
environ 4% des revenus de l'exercice 2018-2019. Le dirigeant a
néanmoins cité plusieurs leviers qui doivent permettre de plus que
compenser ce manque à gagner. La société entend bénéficier de la
hausse de ses taux de captation, c'est-à-dire le pourcentage des
salariés déjeunant dans les cantines plutôt qu'à l'extérieur quand
ils travaillent en présentiel. Le chiffre d'avant-crise se situait
autour de 50% alors que le groupe a actuellement porté ses taux à
un ratio "de l'ordre de 60% à 75%", a expliqué Philippe Guillemot,
avec de plus "une augmentation du ticket moyen" par convive.
L'entreprise veut en outre élargir la taille de son marché
potentiel sur le segment Entreprises, en ciblant des PME en France
et Italie. Le groupe estime ces opportunités additionnelles à 1,8
milliard d'euros au total.
Elior devra aussi davantage fidéliser ses clients. A 91,4% à fin
septembre le taux de rétention "reste faible", pointe Bernstein,
même si la pandémie a joué en défaveur du groupe sur cet
indicateur. En comparaison, le britannique Compass et le français
Sodexo affichent des ratios de respectivement 95,4% et 93,1%. Elior
compte faire remonter ce taux à environ 95% d'ici à trois ans.
Philippe Guillemot a expliqué que le groupe avait mis en oeuvre un
plan d'action dédié à cet objectif, avec notamment un système de
bonus sur la rémunération des équipes. "Nous avons enrichi notre
outil de CRM [gestion de la relation client, NDLR] pour mieux
identifier les clients à risque et mieux les accompagner", a aussi
indiqué le dirigeant.
Le défi de l'inflation
"L'amélioration du taux de rétention reste un défi pour Elior et il
leur faudra démontrer dès l'exercice en cours (2021-2022, NDLR) une
importante amélioration", prévient Florent Thy-Tine, de Midcap
Partners. "La cible d'un taux de 95% est agressive", juge un autre
intermédiaire financier.
Elior s'est fixé un cap prometteur, mais le marché attend donc des
signes tangibles d'amélioration de son activité. Ce qui réclamera
de la patience. L'exercice 2021-2022 risque d'être pénalisé par de
nouvelles restrictions sanitaires, même si les marchés européens
d'Elior, soit la France, l'Italie, l'Espagne et le Royaume-Uni,
font partie des pays les mieux vaccinés du Vieux Continent.
Par ailleurs, sur environ 92% de ses contrats, le groupe devra
négocier avec ses clients pour répercuter l'inflation actuelle des
coûts alimentaires et de main d'oeuvre. Ces discussions porteront
surtout leurs fruits au second semestre de l'exercice en cours, ce
qui signifie que les marges des six premiers mois devraient être
plus modestes. "La capacité du groupe à répercuter l'inflation sera
déterminante au cours des prochains trimestres", remarque Florent
Thy-Tine.
Elior devra bel et bien respecter ses ambitieux engagements pour
convaincre les plus perplexes des investisseurs.
-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94;
jmarion@agefi.fr ed: ECH
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