ENTRETIEN: La crise est un "accélérateur" des tendances de l'immobilier -DG de Gecina
September 10 2020 - 5:32AM
Bourse Web Dow Jones (French)
(Rediffusion de l'entretien publié ce jeudi à 07h00)
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Gecina, la première foncière de bureau en
Europe, s'estime relativement protégée de la crise sanitaire et
économique par son portefeuille d'actifs centré sur Paris. La
demande de surface se modifie néanmoins, en lien avec la
digitalisation du monde du travail qui s'accélère, explique Méka
Brunel, la directrice générale du groupe dans un entretien accordé
à l'agence Agefi--Dow Jones. Confortée dans son positionnement
premium, l'entreprise affiche aussi des ambitions dans l'immobilier
résidentiel, gage de résilience, visant un premier objectif de
10.000 logements en exploitation.
Agefi--Dow Jones : Les résultats semestriels ont montré une
résistance de Gecina. Anticipez-vous un impact sur les valeurs
patrimoniales et les loyers ?
Méka Brunel : A ce stade c'est imprévisible, il est impossible de
faire des prévisions de cette nature. Nous sommes encore dans l'œil
du cyclone. La résilience de nos résultats au premier semestre est
le fruit d'un travail effectué très en amont. En 2014, Gecina était
un simple collecteur de loyers. Le groupe est devenu en six ans un
gestionnaire pro-actif d'actifs, privilégiant le rendement global
grâce à la rénovation ou la cession de nos immeubles en fonction de
leur potentiel, plutôt que l'accumulation d'actifs. Depuis la fin
2018, nous avons ajouté la notion de services avec le déploiement
de la marque YouFirst. L'attrait des entreprises pour la qualité de
nos actifs et leur emplacement central permettant la mixité des
usages limitent la vacance et expliquent nos bons résultats. Près
de 93% de notre patrimoine est situé dans Paris intra-muros, le
Croissant Ouest, la Défense et les Hauts-de-Seine.
Agefi--Dow Jones : Constatez-vous une diminution de la demande de
bureaux dans votre portefeuille, ou une évolution de cette demande
vers des surfaces plus petites?
Méka Brunel : La crise sanitaire a entraîné une crise économique.
De ce fait, les entreprises sont dans un processus de réévaluation
de leurs besoins au sens large. La demande évolue vers plus
d'espace par personne et moins de densification. Nous n'observons
pas de mouvement général ou radical. Il peut y avoir une diminution
de nombre de mètres carrés demandés de la part des clients, mais
qui est davantage la conséquence de la digitalisation du travail
qui s'accélère avec la crise sanitaire que du télétravail. La
digitalisation entraîne la suppression des métiers administratifs
au bénéfice des métiers de services et des métiers à valeur
ajoutée.
Agefi--Dow Jones : Dans quelle mesure le télétravail et le
"flexoffice" bouleversent-ils votre stratégie ?
Méka Brunel : Cela ne bouleverse absolument pas notre stratégie. Au
contraire, ces tendances valorisent encore plus qu'avant
l'emplacement, la qualité de nos immeubles, et favorise le
développement des espaces de travail partagés ou tiers-lieux. La
notion de télétravail implique une réflexion profonde, qui dépasse
le simple besoin de travailler de chez soi. Les crises ne créent
pas les tendances mais accélèrent le mouvement. Cela fait des
années que nous observons trois tendances lourdes. D'abord, la
métropolisation et le recentrage autour des hubs de transport et
des lieux de vie. Deuxièmement, l'accélération de la digitalisation
qui transforme le monde du travail. La troisième tendance est liée
à l'urgence climatique, dont nous tenons compte dans nos
rénovations et la conception de nouveaux projets bas carbone dans
une démarche d'économie circulaire.
Agefi--Dow Jones : La crise sanitaire fragilise-t-elle le modèle du
coworking, déjà éprouvé par les difficultés de certains de ses
acteurs comme WeWork ?
Méka Brunel : Je ne le pense pas. Comme toute activité nouvelle, le
coworking connaît une concentration de ses acteurs et a besoin de
s'adapter au bout d'un certain temps. Les lieux de travail partagés
comprenant des espaces communs répondent à un besoin d'échanges qui
n'est pas remis en cause, d'autant que les acteurs du coworking se
situent eux-aussi dans des lieux centraux, attractifs, proches des
transports et lieux d'habitation. Le modèle peut évoluer. Les
règles sanitaires actuelles obligent à dédensifier. Cela implique
de trouver de la distance et donc d'adapter les lieux de
convivialité, de réunion, de partage alors que se réduit le nombre
de bureaux individuels.
Agefi--Dow Jones : La crise sanitaire incitera-t-elle Gecina à
renforcer ses activités résidentielles ?
Méka Brunel : Là encore, la crise sanitaire est un accélérateur.
Nous travaillons depuis longtemps dans l'immobilier résidentiel,
une activité que nous avons gardée et revisitée et qui dispose de
plusieurs atouts. Elle est résiliente, davantage encore que
l'immobilier de bureau. Un immeuble d'habitation ne peut se
retrouver totalement vacant du jour au lendemain. Les agences de
notations ont toutes souligné dans leur analyse du groupe que le
fait de disposer d'un portefeuille résidentiel était un gage de
résilience. De plus, le logement locatif privé institutionnel
répond au déficit de l'offre de logements, protège mieux le
locataire avec des baux de 6 ans contre 3 ans pour un particulier,
et permet d'accélérer la mise aux nouvelles normes
environnementales des immeubles. Les besoins sont là, nous allons
continuer à développer ce métier. Nous sommes déjà le plus grand
propriétaire privé parisien avec 6.000 logements en exploitation et
nous visons un premier objectif de 10.000 logements.
-Propos recueillis par François Berthon, Agefi-Dow Jones. 01 41 27
47 93; fberthon@agefi.fr ed: ECH
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September 10, 2020 05:12 ET (09:12 GMT)
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